Près de 655.000 Irakiens sont morts à cause de la guerre, affirment des chercheurs dans une nouvelle étude parue cette semaine dans le journal médical britannique, The Lancet et conduite par des médecins de l'Université Johns Hopkins et l'école de médecine Al Mustansiriya de Bagdad en collaboration avec le Massachusetts Institute of Technology (MIT).
Selon ces experts de santé publique, quelque 655.000 civils sont morts en Irak de mars 2003 à juillet 2006, dont 601.000 violemment pour la plus grande partie à la suite de blessure par balle.
""Je ne pense pas que ce rapport soit crédible"", a affirmé le président américain George W. Bush lors d'une conférence de presse, quelques heures après la diffusion de l'étude. ""Pas plus que le général Casey, pas plus que les dirigeants irakiens"", a-t-il ajouté, faisant référence au général George Casey, le commandant des forces américaines en Irak.
""Je persiste à dire que beaucoup de gens innocents ont perdu la vie.
600.000, ou le chiffre qu'ils avancent- ce n'est tout simplement pas crédible"", a insisté M. Bush, maintenant le bilan de 30.000 morts civils qu'il avait avancé dans le passé.
Un porte-parole du Pentagone, Bryan Whitman a aussi expliqué mercredi ""la difficulté pour les Etats-Unis de pouvoir précisément déterminer le nombre de morts parmi les civils en Irak qui résultent de l'action des insurgés"".
""Les forces armées des Etats-Unis et ce département ne collectent pas ce type d'informations"", a-t-il poursuivi devant la presse.
""Le ministère irakien de la Santé est probablement le mieux placé"", a ajouté Bryan Whitman.
Selon la dernière estimation de ce ministère, 128.000 civils irakiens ont été victimes de la guerre.
Pour l'auteur de l'étude publiée dans The Lancet, le Dr. Gilbert Burnhan, de l'université Johns Hopkins à Baltimore (Maryland, est), cette estimation est incomplète.
""Le système de collecte d'informations ne fonctionne pas et je pense que les données disponibles sont incomplètes"", a-t-il dit mercredi dans une conférence de presse téléphonique.
Rejetant toute accusation de motivation politique dans la publication de cette étude moins d'un mois avant les élections législatives américaines de mi-mandat, le Dr. Burnham a affirmé que la méthodologie utilisée pour faire cette évaluation était éprouvée et largement utilisée dans les pays en développement où il n'y a pas de système statistique fiable.
Selon la fourchette appliquée, ""nous sommes à 95% certains que nous avons la bonne estimation"", a expliqué le médecin.
Il a précisé que l'enquête avait été conduite en Irak par des professionnels de la santé auprès de 1.849 familles irakiennes représentant au total 12.801 personnes.
Ce médecin a également souligné que 87% des familles ont pu fournir un certificat de décès et que la majorité des personnes interrogées ""n'étaient pas sûres"" de savoir qui était responsable du décès d'un des leurs.
Les morts attribuables aux forces de la coalition représenteraient 31% de cette même catégorie, d'après l'étude.
Le taux de mortalité brut est passé de 5,5 pour mille habitants par an, avant l'intervention américaine en 2003, à 13,3 pour mille habitants pendant la période d'occupation. Une telle progression constitue une urgence humanitaire, selon le Dr. Burnham.
La durée du conflit associée à la taille de la population touchée --l'Irak compte près de 27 millions d'habitants-- ont fait de cette guerre l'une des plus meurtrieres des 20e et 21e siècle, soulignent les auteurs du rapport.
La violence et les représailles tuent en moyenne une centaine de personnes chaque jour en Irak, obligeant un millier d'autres à prendre la fuite, a par ailleurs estimé mercredi le coordinateur humanitaire de l'ONU, Jan Egeland