Le pacte social en péril
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- Écrit par SEZAME
- Catégorie : Dossier
Les grandes institutions qui ont façonné la société française sont en crise. L’Etat, la famille, l’Eglise, l’école, les syndicats, les partis politiques ont de moins en moins prise sur la société. Ces défaillances prennent une forme particulièrement grave dans les banlieues défavorisées. La famille déstructurée a du mal à remplir ses fonctions. L’Etat y est contesté dans ses modes de gestion et non en tant que tel. Contrairement à ce qui se dit, la banlieue n’est pas une zone de dissidence. L’école comme institution éducative et fabrique de citoyens est en décalage par rapport à l’univers mental et culturel de beaucoup de jeunes de par ses méthodes pédagogiques. L’école produit un discours civique qui s’oppose à la réalité de ces jeunes : déficit de représentativité politique, non visibilité dans le champ médiatique, etc. Interrogés par des journalistes, certains jeunes expriment des revendications d’un réalisme désarmant. Citons indistinctement des formules qui expriment à la fois des demandes politiques légitimes et une soif de reconnaissance : « Nous voulons des responsables qui tiennent leurs promesses. Nous voulons notre part du gâteau, nous voulons être respectés et reconnus. Nous voulons vivre dignement, nous voulons être traités comme les autres citoyens …» N’est-ce pas là ce que revendiquent d’autre catégories de la population française en recourant à des méthodes différentes ?
Les événements ont le mérite de réhabiliter les débats publics sur des questions fondamentales. Profondément choqués par cette violence, les Français cherchent néanmoins à en comprendre les raisons. La classe politique semble désemparée face à une forme de contestation inédite : absence d’interlocuteurs et de revendications explicites, mode de contestation violent et chaotique qui échappe aux catégories politiques traditionnelles. Les rivalités politiques et électorales conduisent à des surenchères verbales qui traduisent, une fois de plus, le caractère simplificateur du discours politique et son incapacité à prendre en charge la complexité du monde dans lequel nous vivons, banlieue comprise. Certains commentateurs cultivent l’affrontement intercommunautaire en faisant appel à des symboles dont la seule ambition est de pousser à la politique du pire. Le recours à des formules telles que « Intifada des banlieues », « complot islamiste » ou encore « deuxième guerre d’Algérie » fausse le diagnostic et relève de la dénégation et de la stigmatisation qui fragilisent un peu plus un contrat social qui a pourtant assez à faire dans l’état.